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Révolutions africaines: De Sankara à Goîta en passant par Dadis, Strasser, Samuel Doe et Mamadi Doumbouya

Révolutions africaines: De Sankara à Goîta en passant par Dadis, Strasser, Samuel Doe et Mamadi Doumbouya
0 commentaires, 9 - 10 - 2022, by admin

Par Venance Konan
En 1983, à l’âge de 34 ans, Thomas Sankara s’emparait du pouvoir en Haute Volta, pays dont il changera le nom en Burkina Faso.
Il avait une formation idéologique de gauche très solide, était très bien structuré, et avait du charisme. Nous étions alors étudiants en France et raffolions de ses discours anti colonialistes et anti-impérialistes. Il avait fait de la lutte contre la corruption son cheval de bataille et jusqu’à sa mort, personne ne peut affirmer qu’il ait triché sur ce point. Il avait véritablement une vision.
Etait-elle la bonne ?
Avait-il la bonne stratégie ?
C’est un autre débat. Toujours est-il qu’il a mis son pays au travail, lui a redonné sa dignité. C’est lui qui a imposé le « Faso Dan Fani », cet habit typiquement burkinabé qui est devenu la tenue nationale du Burkina Faso et qui est porté au-delà. Vers la fin de son règne, il avait commencé à dériver, au point où certains observateurs se demandaient si son régime n’était pas en train de devenir comme celui de Sékou Touré. Les Comités pour la défense de la Révolution, les fameux CDR faisaient régner la terreur et du sang avait commencé à couler. Vous me direz que de la même façon que l’on ne fait pas d’omelettes sans casser les œufs, on ne peut pas faire de révolution sans faire couler un peu ou beaucoup de sang.
Il avait rendu tous les loyers gratuits, à la grande joie de tous les locataires. Mais il n’avait pas du tout pensé à toutes ces personnes qui avaient travaillé toutes leurs vies, s’étaient souvent endettées, pour construire une maison afin de vivre de son loyer pendant leurs retraites, et qui se retrouvaient privées de revenus, contraintes parfois de continuer de payer les dettes contractées.
Vers la fin de son régime, les avis de la population burkinabé étaient pour le moins contrastés et l’on ne peut pas dire que sa mort ne fut pas une délivrance pour bon nombre de ses compatriotes. Il n’empêche qu’il est aujourd’hui le héros d’une bonne partie de la jeunesse africaine et bon nombre de nos nouveaux « révolutionnaires », souvent de salon, se réclament de lui.
Avant Sankara, il y eut Samuel Doe qui prit le pouvoir au Liberia en 1980, à l’âge de 29 ans, après avoir massacré le président William Tolbert et ses ministres. Lui, il eut la pudeur de ne pas se présenter comme un révolutionnaire. De toutes les façons il n’avait aucun discours. Il régna en dictateur jusqu’à son assassinat en 1990. Charles Taylor qui lui succéda en 1997 après une sanglante guerre civile et que je fréquentai un peu, lui, osait se présenter comme un révolutionnaire, alors qu’à l’évidence, il n’était qu’un chef de guerre pillard et sans scrupules ni morale. Il croupit en ce moment dans une prison en Europe.
En Guinée, nous eûmes droit à Moussa Dadis Camara qui prit de force le pouvoir en 2008, à la suite du décès du président Lansana Conté. Il nous fit rire avec ses « Dadis show », mais à la fin, il fit massacrer et violer des dizaines de personnes dans un stade et là, ce ne fut plus drôle du tout. Il est face aux juges actuellement.
En Sierra Leone il y eut Valentine Strasser qui prit le pouvoir en 1992 à 26 ans. Il fit appel aux mercenaires sud-africains de la société « Executive outcomes » pour combattre les rebelles de Fodé Sankoh. Renversé par un coup d’Etat, il s’enfuit en Grande Bretagne où il se retrouva au chômage. En 2010 on le retrouva à Touba au Sénégal, errant dans les rues, atteint de démence. En 2012, il est rentré à Freetown où il était devenu un vagabond, vivotant aux crochets de sa mère.
La Côte d’Ivoire a cinq voisins. L’un, le Liberia, est dirigé par un ancien footballeur qui a été élu par son peuple. L’autre, la Guinée, est dirigée par un ancien de la légion étrangère française. Il est devenu président à 41 ans par coup d’Etat.
A-t-il une quelconque légitimité ?
Aucune. Il a juste osé faire le coup et il l’a réussi. Le Mali, lui aussi est dirigé par un militaire né en 1983, l’année où Sankara fit sa révolution. Lui aussi a pris le pouvoir par la force.
Quelle légitimité a-t-il ?
Aucune. Il ne peut se targuer d’avoir remporté des batailles face aux terroristes qui sont en train de détruire le Mali. Mais il paraît qu’il est un révolutionnaire, le nouveau Che Guevara africain, l’idole des panafricanistes.
Cherche-t-il à unir l’Afrique ?
Je ne l’ai personnellement pas entendu tenir un discours allant dans ce sens. Il fait pour le moment palabre avec la Côte d’Ivoire et le Niger. Il est devenu un héros, semble-t-il, parce qu’il a chassé la France de chez lui et s’est allié aux mercenaires russes de Wagner pour piller son pays.
Et les terroristes ?
Ils se portent très bien, alhamdoulilayi ! Au Burkina Faso, un jeune capitaine de 34 ans vient de prendre le pouvoir. L’âge qu’avait Sankara quand il arrivait au pouvoir.
A-t-il déjà remporté des victoires dans la lutte contre le terrorisme ?
Pas à ma connaissance. Cela n’empêche pas une partie de la jeunesse burkinabé de l’acclamer dans les rues. Je leur souhaite beaucoup de courage et de chance. Dieu est grand.

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