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La France et son Bourgi

La France et son Bourgi
0 commentaires, 2 - 9 - 2025, by admin

Par Venance Konan
Le moins que l’on puisse dire est que les relations entre la France et ses anciennes colonies d’Afrique ne sont plus au beau fixe.
Et depuis quelques années, les Français cherchent à comprendre ce qui n’a pas marché, et surtout comment recoller les morceaux pour ne pas totalement perdre pied dans cette région si stratégique au profit des Russes et des Chinois. Des missions parlementaires françaises ont sillonné nos pays et rencontré de nombreuses personnes pour chercher à comprendre. A mon avis, parmi les nombreux reproches que les Africains font à la France, il y a essentiellement un type de relations et de pratiques qu’ils estiment humiliantes et ayant contribué à les priver de leur souveraineté et des richesses de leurs pays.
Ces relations que l’on a appelées « françafrique » et qui sont personnifiées par un certain Robert Bourgi. C’est ce dernier qui s’est lui-même défini récemment dans une vidéo comme le « dernier des Mohicans » de la françafrique.
Que voulez-vous que les Africains pensent de la France lorsque Robert Bourgi sort ses mémoires et y raconte avec force détails comment, dès les indépendances, le Général de Gaulle que l’on veut nous présenter comme le parangon de la vertu avait mis en place un système pour faire financer son parti politique par les Africains qui avaient à peine de quoi manger et se soigner ? Que voulez-vous que les Africains pensent de la France, lorsque Robert Bourgi raconte comment ce système a perduré jusqu’à Jacques Chirac tout au moins (Bourgi fait tout pour éviter de mouiller son ami Sarkozy dans son livre), comment, avec de Villepin, le nouveau parangon de la vertu politique en France actuellement, ils ont obligé Laurent Gbagbo à cracher au bassinet avec deux milliards de francs CFA, comment Blaise Compaoré envoyait de l’argent en petites coupures à ce même Chirac via des djembés, comment des chefs d’Etats africains mettaient leurs avions à la disposition de ministres français pour leurs courses ou missions officielles, et aucun magistrat n’a levé le sourcil ?
Parce qu’il s’agissait de l’argent des Noirs Africains ?
Nicolas Sarkozy a pourtant été condamné pour avoir reçu de l’argent de Kadhafi afin de financer sa campagne électorale. Mais personne n’a interrogé Bourgi lorsqu’il a raconté avec force détails comment il a racketté des chefs d’Etats africains pour financer aussi des campagnes et remplir des poches.
N’est-ce pas là de la corruption ?
Où est la justice française ?
Mieux, tous les médias français ont ouvert leurs portes à Bourgi pour qu’il vienne donner encore plus de détails et que son livre se vende encore mieux.
Comment voulez-vous que les Africains continuent à avoir le même respect pour cette France-là, surtout lorsqu’elle veut leur donner des leçons de morale ?
Lorsque l’on demande à Robert Bourgi pourquoi les chefs d’Etats africains acceptaient de donner tout cet argent aux hommes politiques français, il répond ceci : « les Africains restaient encore prisonniers d’un complexe d’infériorité. Qu’ils eussent affaire à des présidents, à des ministres ou à des sous-ministres français, ils se sentaient en état d’infériorité. » Ce complexe a aujourd’hui disparu chez une bonne partie de la jeunesse africaine.
Et, entendre un Robert Bourgi pérorer dans les médias français sur toutes ses turpitudes en Afrique ne fait que raviver notre ressentiment. Oui, il nous explique que nous avons été gouvernés par des chefs faibles et complexés qui se sont laissé dépouiller de notre argent par des gens qui, le moment venu, leur ont planté le couteau dans le dos.
Qu’a fait Chirac pour Gbagbo qui lui avait donné deux milliards de francs qui auraient pu servir à construire de nombreux centres de santé dans notre pays ?
Qu’ont fait les hommes politiques français pour Mobutu qui s’était mis totalement à leur service ?
Au fond, je crois que nous devrions remercier Robert Bourgi d’avoir déciller les yeux de ceux qui voulaient encore croire en la pureté des relations entre la France et l’Afrique. Mais si la France veut vraiment avoir des nouvelles relations sans ambigüité avec l’Afrique, elle devrait faire taire des gens comme Robert Bourgi et juger ceux des ses hommes et femmes politiques qui ont extorqué de l’argent aux chefs d’Etats africains, tout comme on a jugé Sarkozy pour avoir pris de l’argent à Kadhafi. La France devrait commencer par juger Robert Bourgi, la cheville ouvrière de cette vaste œuvre de corruption.

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