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Le général Konaté: « La Guinée, c’est chez moi, personne ne peut m’interdire d’y revenir »

Le général Konaté: « La Guinée, c’est chez moi, personne ne peut m’interdire d’y revenir »
0 commentaires, 28 - 5 - 2019, by admin

Depuis l'accession au pouvoir d'Alpha Condé, en 2010, Sékouba Konaté, l'ancien président de la transition militaire en Guinée, s'était tenu à l'écart, d'Addis-Abeba à Paris. Dans l'entretien qu'il a accordé à Jeune Afrique, il revient sur ses récentes difficultés à renouveler son passeport, évoque ses rapports avec Moussa Dadis Camara et clarifie sa position face au débat sur la révision constitutionnelle en Guinée.
Depuis sa résidence d’Enghien-les-Bains, en région parisienne, où il a élu domicile depuis son départ du Maroc, en 2016, Sékouba Konatésuit de près les destinées du pays dont il avait cédé les rênes à Alpha Condé au lendemain de sa première élection, fin 2010. Ancien ministre de la Défense et numéro 2 du Conseil national pour la démocratie et le développement, la junte militaire alors dirigée par Moussa Dadis Camara, ce général de brigade avait endossé l’habit de président de la transition de janvier à décembre 2010, avant de céder le pouvoir à Alpha Condé.
Devenu haut-représentant pour l’opérationnalisation de la Force africaine en attente, il prend alors ses quartiers à Addis-Abeba jusqu’en 2014. Une fonction qui, selon son entourage, devait l’inciter à ne pas s’accrocher au pouvoir. Après avoir séjourné successivement aux États-Unis puis au Maroc – où il a été déclaré persona non grataen raison des « menaces » qu’il proférait contre les autorités de Conakry -, il s’est installé en France. Depuis, huit années, il n’a plus remis les pieds en Guinée.
Longtemps demeuré discret, l’ancien président de la République par intérim éprouvait, depuis plus de six mois, des difficultés pour renouveler son passeport. Au point qu’il a un temps choisi de se tourner vers le président sénégalais Macky Sall pour intercéder auprès de son homologue guinéen, voire pour lui accorder la nationalité sénégalaise, ainsi que Jeune Afrique l’a révélé. Après avoir « dû batailler » et « impliquer le chef de l’État » guinéen, Alpha Condé, Sékouba Konaté confirme aujourd’hui à Jeune Afrique qu’il a finalement pu obtenir, le 7 mai, le précieux sésame. En l’occurrence, un passeport ordinaire et un autre diplomatique, fabriqués en Guinée et qui lui ont été envoyés en France.
Dans l’entretien exclusif qu’il a nous a accordé, le général Konaté n’élude aucune question : d’une possible rencontre avec Alpha Condé à sa relation avec Dadis Camara, en passant par le débat autour d’une réforme constitutionnelle qui pourrait ouvrir la voie à un troisième mandat du président sortant…
Jeune Afrique : vous avez éprouvé des difficultés à renouveler votre passeport guinéen. Le problème est-il résolu ?
Sékouba Konaté : Après une longue attente et divers échanges, il l’est effectivement. Mais il est aberrant que j’aie dû batailler à ce point – jusqu’à impliquer le président Alpha Condé lui-même – pour retrouver le droit de me déplacer librement, comme tout citoyen.
Quel sera votre prochain déplacement, à présent que vous pouvez circuler à votre guise ?
Pour le moment, je n’ai prévu aucun déplacement mais, bien sûr, j’ai des envies. Comme vous le savez, je suis l’un des rares militaires en Afrique de l’Ouest à avoir permis la restauration de la démocratie dans son pays. Aussi je compte servir d’exemple afin que ma contribution puisse bénéficier à d’autres. Notre continent a besoin de paroles politiques crédible et de combats sains.
On parle d’une prochaine rencontre entre vous et le président Alpha Condé…
Une telle rencontre serait normale, voire légitime, compte tenu du rôle que j’ai pu jouer dans mon pays. Mais je vous rappelle que je suis toujours un général en fonction, au service de mon pays et du peuple guinéen, donc des autorités de la nation.
L’actualité politique en Guinée est dominée par le débat sur la révision de la Constitution. Comment envisagez-vous ce scénario ?
Ce débat a lieu alors que pour l’heure, aucune réelle discussion n’est entamée. Je n’entends que des déclarations de panique sans l’ombre d’un dialogue constructif. Je n’ai aucun conseil à donner au chef de l’État mais, comme je vous l’ai dit, ayant contribué à l’instauration de notre démocratie, j’espère simplement que mon action servira d’exemple et que le président agira dans l’intérêt du peuple guinéen.
Envisagez-vous de rentrer en Guinée ? Si oui, pourriez-vous y jouer un rôle politique ?
Rentrer en Guinée, bien évidemment, je l’envisage. Mais je rappelle qu’un militaire se doit de rester absolument apolitique. Je n’ai pas d’autre parti que le peuple. En revanche, j’entends jouer un rôle moral. Je souhaite être l’un des garants des institutions que j’ai contribué à consolider.
En défendant la Constitution telle qu’elle existe aujourd’hui ?
Cela n’est pas mon problème mais celui du peuple. Or par le passé le peuple a déjà défié Lansana Conté, Dadis Camara et moi-même. C’est à lui de défendre sa souveraineté s’il l’estime menacée.
Êtes-vous libre de rentrer en Guinée ?
La Guinée, c’est chez moi. Personne ne peut m’interdire d’y revenir. Je prépare minutieusement ce retour.
Vous avez été le haut représentant de la Force africaine en attente. Craignez-vous que les pays côtiers, longtemps épargnés, deviennent une cible régulière des terroristes ?
Nous devons former notre armée pour répondre à toute éventualité sur le plan militaire et sur celui du renseignement, tout en collaborant étroitement avec les États-Unis et la France qui ont tous les moyens logistiques. Mais c’est à nous-mêmes de défendre nos pays. Nous devons prendre notre destin en main afin de parer à toute éventualité.
Quels rapports entretenez-vous aujourd’hui avec le capitaine Moussa Dadis Camara ?
Nous avons exercé ensemble de hautes responsabilités, il est donc normal que nous nous entretenions pour discuter de l’avenir de notre pays – il est, de plus, un ami. Son jugement et son regard sur ces sujets sont souvent précis et pertinents. Il m’a dit qu’au Burkina Faso, où il réside, il est sur écoute. Je demanderai aux autorités burkinabè et au président Alpha Condé de le laisser communiquer librement.
Nous savons tous quelle est la popularité de Dadis dans l’armée. Il a une partition à jouer dans l’édification de notre pays, en tant qu’ancien président. Si Alpha Condé entend mes conseils, il lui accordera le statut d’ancien chef d’État.
Plaiderez-vous en faveur de son retour en Guinée ?
Pour la stabilité du pays, il faudrait que tous les dignes fils de la Guinée se parlent. Quant à son retour, on verra au fil du temps…
Interview réalisée par Jeune Afrique

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